Diane Marois “la musique est devenue mon prisme de lecture”

Géraldine Kamps
Vous connaissez probablement sa voix chaude et envoûtante avec laquelle elle présente chaque après-midi sur La Première ses choix musicaux, au gré de l’actualité et de ses combats. Entre sa passion pour la musique, la philosophie et la spiritualité juive, Diane Marois a accepté de nous dévoiler quelques-unes de ses multiples facettes.
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Diane Marois est née en Normandie, « fruit de l’union de deux mondes qui avaient peu de chances de se rencontrer ». D’une part, le côté maternel, juif polonais intellectuel. De l’autre, le côté paternel, normand, cultivateur, d’origine catholique devenu non pratiquant, « avec des débats dignes de Flaubert et Maupassant, réunissant autour d’une même table des gens de gauche, Lucien Bodard, des conservateurs résistants, et des gens de droite assumée et raciste, à l’image d’une certaine France », raconte-t-elle. « Un environnement riche, même si parfois conflictuel ».

C’est un judaïsme de gauche, humaniste et engagé, une identité juive dans ce qu’elle a de plus philosophique et culturel que sa mère et ses grands-parents maternels lui transmettront de façon très marquée. « Sans oublier le chapitre Shoah », décrivant les humiliations, les crimes, l’horreur, l’extermination, les comportements humains « des plus vils aux plus beaux » vécus ou subis en Belgique et à Varsovie. « J’ai grandi avec ça, mais sans pour autant que ce regard sur l’humanité soit fermé à l’espoir », insiste Diane.

Ballotée entre la France et la Belgique après la séparation de ses parents, la petite fille termine ses primaires dans une école communale de Ganshoren, avant d’entrer au Lycée Dachsbeck, puis à Jacqmain. Elle rejoindra un temps la JJL et la Colonie Amitié.

Diane se lance ensuite dans des études de Sciences po à l’ULB et découvre l’Union des étudiants juifs de Belgique (UEJB), avec laquelle elle se rend pour la première fois en Israël. Elle achève ses études à Paris, où son approche du judaïsme prend un tournant. « Je n’ai jamais été très communautaire », confie-t-elle. « J’ai toujours choisi mes amis en fonction de nos centres d’intérêt avant notre identité. Ma famille a toujours plutôt rejeté la religion après ce qu’elle avait vécu pendant la guerre, même si on célébrait les grandes fêtes juives. Mais je me suis rendu compte à l’approche de la trentaine que cette conception du judaïsme limitée au fait d’être humaniste et petite-fille de la Shoah ne me convenait pas. Une foi grandissait en moi ». La vision du monde de Diane doit se voir compléter par les textes. « Ma manière d’être juive est d’être une étudiante éternelle », sourit celle qui, nourrie d’une soif philosophique et spirituelle, va se mettre à lire et à suivre des conférences et des séminaires du Rav Benchetrit, de Marc-Alain Ouaknin, et autres « vulgarisateurs pour les non-religieux ». « Le judaïsme a apporté au monde l’esprit critique par la simple lecture des textes anciens. Ce pouvoir et cette énergie des mots ont illuminé ma vie », affirme Diane, dont l’éveil n’a pas toujours été compris dans sa famille, en dehors peut-être de sa grand-mère. « Elle m’a offert le petit livre “La chaise vide” du rabbi Nahman de Bratslav en me confiant que l’identité juive de notre famille rejaillirait en moi. Quand j’ai lu son précepte “La voie la plus directe pour se rapprocher de Dieu, c’est la musique et le chant”, je me suis dit : “Toi, tu seras mon rabbin !” ».

 

« Le Feel de Diane »

Si la jeune femme rêve depuis toute jeune de « devenir Anne Sinclair », elle est aussi passionnée de musique. Avec le rap, Diane a découvert, adolescente, le vécu des jeunes des banlieues. Avec le hip-hop, elle a mieux compris le quotidien des noirs américains. « La musique est devenue mon prisme de lecture », affirme-t-elle. Après plusieurs expériences professionnelles dans la presse à Paris (comme pigiste pour Le Nouvel ObsL’Echo des Savanes) et New York (Trace, magazine et TV avec le groupe Lagardère), dans la pub (Air, sous la direction d’Eric Hollander) et en télévision (Thierry Ardisson lui loue les droits de « Paris Dernière » pour une adaptation « Belgique Dernière »), Diane écrit une série en format court, « Cocktail de filles », qui sera diffusée sur TF1 pendant deux saisons. Elle y apprendra le métier de productrice, et les difficultés d’un monde impitoyable, préférant privilégier la création. En 2013, elle coréalise une série documentaire « Les chroniques d’Orphée » consacrée à la musique, qui rassemblera sur YouTube plus de 230.000 vues !

Une magnifique carte de visite qui lui permettra de se faire remarquer notamment par les grandes marques pour développer leur image. En juillet 2019, elle est recontactée par la RTBF pour mener sa propre émission radio « Le Feel de Diane », du lundi au vendredi de 14h30 à 16h sur La Première. « Parce que les chanteurs sont les témoins de leur époque au même titre que les auteurs et les réalisateurs », estime-t-elle. Un autre regard, qui oscille entre Soul, Funk, Disco, Underground, musique alternative et musique française façon madeleine de Proust, rassemblant toutes les générations au gré de thématiques qui lui tiennent à cœur ou font l’actualité. La musique comme un vecteur de conscience qui a su, pendant le confinement, maintenir l’énergie de ses auditeurs, leur changer les idées, les rassurer, les réconforter. Chaque mot prononcé étant mesuré et préparé par Diane qui tient à rendre le plus concret possible cet héritage de la culture juive qui lui a été transmis. « Parce qu’avec un seul mot, on peut créer un effet papillon », assure-t-elle.

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