La kabbale pour les nuls

Ouri Wesoly
Hier, nous parlions du mélange détonnant stars-sectes-argent*. Restons-y avec une sorte de bonne nouvelle : Esther nous a quittés. Non, elle n’est pas morte, c’est bien plus grave : elle a apostasié. Quelle Esther ? Mais il n’y en a qu’une, voyons...
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Ok, on arrête avec cet insoutenable suspense : l’Esther en question, c’est bien sûr la Reine de la Pop, la « Matérial Girl », Madonna herself qui avait adopté ce joli prénom en se convertissant à la Kabbale en 1996.

Curieuse manière de parler : comment peut-on se « convertir » à la Kabbale qui est un objet d’études (v. plus bas) ? C’est qu’il s’agit d’une Kabbale un peu spéciale, tout comme celui qui l’a fondée, au demeurant.

Car, au début (en 1929), il y a Fievel Gruberger et jusqu’à 33 ans, il mène une vie tout à fait normale. Pour un brave garçon juif de Brooklyn s’entend : éducation religieuse. Se marie  avec une gentille fille bien de chez nous. Lui fait huit enfants. Travaille comme agent d’assurances.

Et puis en 1962, notre Fievel décide de gagner du vrai pognon. Il divorce, prend le nom de  Philip S. Berg et se lance dans le très juteux créneau de la religion. Il suffit de voir la machine à cash qu’a fait Ron Hubbard de son « Eglise de Scientologie ».

Berg, lui, son truc, c’est la Kabbale. Il s’autoproclame « plus grand kabbaliste du monde » et fonde le « Centre de la Kabbale » à Los Angeles. Indignation des rabbins, ricanements des spécialistes. Il n’en a cure. Ce ne sont pas eux qui l’intéressent.

Son idée, c’est de révéler les mystères de la Kabbale aux non-Juifs. Grâce à elle, ils pourront percer les énigmes de l’Univers, guérir du cancer, amener la paix dans le monde et quelques autres bricoles : pénétrer les secrets de Dieu  ou découvrir un régime vraiment amaigrissant.

Excitant, mais s’il faut pour cela passer des décennies à apprendre l’hébreu et l’araméen et à étudier le Talmud… Pas de panique. Philippe Berg a sa propre méthode qui ne gaspille pas le temps de la sorte. Pour étudier le Zohar, un des livres majeurs de la Kabbale,« il n’est pas nécessaire de comprendre les mots, il suffit de les prononcer correctement ».

Ah, comme cela, d’accord. Les curieux pointent le bout du nez. Et parmi eux, miracle : Madonna. La star, qui a toujours eu des poussées de mysticisme, est méga-séduite : en 96, elle se « convertit » donc, prend le prénom d’Esther, respecte le shabbat.

Et amène quelques amis aussi riches et futés qu’elle : Naomi Campbell, Britney Spears, Demi Moore, Bruce Willis, Ashton Kutcher, Paris Hilton… Pour Philip Berg, c’est le jackpot.

 

La cave se rebiffe

Car les adeptes sont positivement ravis d’acheter à prix d’or tout ce qui est indispensable à un bon kabbaliste : les 23 volumes du Zohar en araméen, des livres rédigés par lui-même ou sa femme.

Et des vidéos, de « l’eau de la Kabbale » (chargée d’énergie divine), divers grigris dont le fameux bracelet en fil rouge qui protège du mauvais œil et permet de se reconnaître entre initiés. 

Sans oublier les dons spontanés. La très zélée Esther/Madonna a ainsi sorti de sa poche entre 13 et 15 millions d’euros. Une misère : en 2010, les actifs du Centre de la Kabbale étaient estimés à 180 millions d’euros…

Et puis, patatras, début avril, le FBI révèle, qu’après enquête, il a découvert des « pratiques troublantes » dans les finances  du Centre. Traduction : les Berg auraient détourné en 40 ans au moins 48 millions d’euros à leur profit.

Stupéfaction, puis fureur de Madonna : la sainte famille Berg, des voleurs ? Est-ce Dieu possible ? Ca l’est. La star abjure illico la Kabbale et, bien décidée à ne plus se faire avoir, décide de rejoindre… une autre secte mais chrétienne et d’extrême droite, celle-là : l’Opus Dei.

Un groupement tout aussi élitiste et tout autant intéressé par les croyants fortunés. La très mystique Madonna devrait s’y plaire : il est recommandé aux adeptes de s’infliger chaque jour quelques coups de fouet dans le dos.

Il est aussi bien vu de porter quotidiennement une bande de métal couverte de pointes de fer sur la cuisse, histoire de se rappeler les souffrances du Christ. Même si les adeptes stars peuvent se contenter de petits picots, c’est tout de même plus classe qu’un bête bracelet rouge…

*http://www.cclj.be/article/3/1999

O.W.

La kabbale pour les autres

En résumant jusqu’à la caricature, on peut dire que la Kabbale est une explication mystique de l’Univers obtenue en déchiffrant les secrets de la Bible juive, la Torah.

Pour ses adeptes en effet, chaque mot, chaque verset, chaque loi possède une signification cachée que l’on peut découvrir par des calculs ou des permutations de lettres.

On obtient ainsi des réponses à des questions essentielles : quelle est l’origine du monde, quelle place y tient l’homme et quel est son avenir, par exemple.

L’étude de la Kabbale permet aussi à celui qui la pratique d’entreprendre un voyage intérieur qui le mène jusqu’au pied du Trône divin.

Tout cela ne s’obtient pas aisément : selon la tradition juive, il faut, avant même de commencer à étudier la Kabbale, être marié, avoir des enfants et surtout posséder une connaissance approfondie tant de la Torah que du Talmud (les commentaires des Sages sur celle-ci).

D’où la légende qui veut qu’un homme de moins de 40 ans qui se plonge dans la Kabbale soit condamné à la folie.

Ecrits au fil des siècles, les principaux textes de la Kabbale sont « Le livre de la Création », « Le livre de l’Eclat » et « Le Livre de la Splendeur » (Zohar).

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